jeudi 28 octobre 2010

Le mystère Zuckerberg

Le film de David Fincher sur la création de facebook, The Social Network, est terriblement efficace et à vrai dire passionnant. Outre la peinture d’une nouvelle génération « cool », ultra ambitieuse, accro à la technologie, consciente de l’importance des réseaux sociaux et désireuse de changer le monde, ce spectacle dépeint un personnage principal, Mark Zuckerberg, assez effrayant.
Asocial, cynique, provocateur, manipulateur, menteur, méchant, terriblement intelligent, pour tout dire…démoniaque. C’est le portrait du fondateur de facebook qui ressort du film. Pas très glorieux. Evidemment cette œuvre prend parti, mais comme on dit, il n’y a pas de fumée sans feu. La question qui me vient à l’esprit est alors de comprendre comment un personnage aussi antipathique peut être à l’origine du plus profond bouleversement des relations sociales de notre planète ? En fait, qui se cache véritablement derrière l’énigmatique Mark Zuckerberg ?
Grâce à lui ou plutôt à cause de lui, nous sommes entrés dans une nouvelle dimension. facebook abolit les frontières. L’Etat Mondial du Meilleur des Mondes d’Aldous Huxley (1932) est là. facebook est le nouveau visage de la planète. Tous réunis sur le réseau des réseaux pour le meilleur et pour le pire. Sous ses apparences de liberté, le lien social créé par ce visionnaire, véritable génie de l’informatique, est sans doute la plus grande menace qui nous guète. Il est devenu si indispensable que personne ou presque ne peut aujourd’hui y échapper. Tout passe désormais par le Net : la famille, les amitiés, comme les affaires et tout ce qui peut aller avec, en bien et en mal. C’est bien là le problème. Sur Internet comme ailleurs, le mal laisse toujours une trace plus marquante que le bien ; A la différence majeure qu’il ne s’efface pas sur la toile, comme un insecte pris au piège n’échappe pas à une araignée. Ainsi quand Mark Zuckerberg  décrédibilise son ex petite-amie dans son blog, le mal qu’il lui fait est irréversible. Elle ne pourra d’ailleurs jamais tourner cette page douloureuse qui la suivra toute sa vie. Même ses plus ardents partisans, comme Sean Parker le co-fondateur de Napster, n’y résistent pas. Impitoyable.
Aujourd’hui tous fichés (à part peut-être quelques « sauvages »), demain tous asservis. Voilà ce que pourrait donner un futur pas si éloigné que ça. En 1948, George Orwell dans son roman  1984 l’avait déjà pressenti. Plus près de nous les frères Wachowski avaient également abordé avec talent cette thématique dans le film The Matrix sorti en 1999. Mark Zuckerberg est passé à l’action en enfantant un embryon de Big Brother. Aujourd’hui il ne s’agit plus de dystopie car la réalité a rattrapé la fiction : « facebook is watching you ».
Zuckerberg a mis au point un système qui, au-delà de son apparence « cool »,  nous entraîne dans un modèle infernal où notre attitude est dictée par la communauté bien pensante. Les personnalités s’effacent petit à petit de peur de mal ressortir sur le Net. L’homme se rapproche alors inexorablement des machines qu’il a créées par la standardisation de sa pensée. C’est le début visible de la négation de la dimension spirituelle de l’homme (et donc de l'homme lui-même), commencée avec la révolution industrielle dans les sociétés dites avancées. Le paradoxe est là: la peur du mal nous conduit vers lui sans que nous nous en apercevions. Et si Zuckerberg était l’incarnation moderne du diable ?

Vous trouverez une critique intéressante du film The Social Network :
Networkhttp://www.filmosphere.com/2010/10/critique-the-social-network-2010/